Jusqu’au 1er mars 2026, le Musée Marmottan Monet propose une exposition consacrée à un sujet plus que fascinant, le sommeil. Intitulée « L’Empire du Sommeil« , l’exposition revient sur une notion vaste en signification et riche en ambiguité. Ce phénomène naturel du corps aura inspiré les artistes depuis l’antiquité. Le musée a en revanche décider de se concentrer en grosse majorité sur des œuvres datant du XIX° et XX° siècle. Parmi ces représentations, une question se pose : que se cache-t-il réellement derrière cet apparent sommeil ? Malédiction, maladie, simple repos ou repos éternel, l’exposition propose à travers 130 oeuvres divisées en 8 grands thèmes de percer les secrets du sommeil.
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Le rêve du poète, John Faed, 1881-1882
Nous passons un tier de notre vie à dormir. La nuit, même si notre corps est au repos, notre cerveau lui continue de fonctionner et une autre réalité prend alors vie. Les rêves ont fasciné en tout temps. Ils font l’objet de nombreuses analyses et théories. Désirs restreints ou souvenirs d’une vie passée ? Grace aux artistes, l’invisible peut devenir visible. Je pense par exemple à Odilon Redon qui est connu comme étant le prince du rêve et le roi des mondes imaginaires.
L’exposition « L’Empire du Sommeil« , actuellement au musée Marmottan Monet, nous montre toute l’ambiguïté du sommeil. On nous montre l’état de sommeil, des personnages en train de dormir mais aussi parfois leurs rêves comme c’est le cas avec l’oeuvre de John Faed intitulée Le Rêve du Poète et réalisée en 1881-1882. C’est une oeuvre incroyable à regarder en vrai. Elle nous montre la richesse de notre monde intérieur.

Mon deuxième sermon, John Everett Millais, 1864
Cette notion d’ambiguïté est vraiment à garder en tête tout au long du parcours de l’exposition. En arrivant, nous sommes accueillis par une série de portraits de personnes complètement endormies, en pleine sieste. Ce sont souvent des membres de la famille des artistes. Ceux-ci représentent le sommeil des innocents, ils sont complètement abandonnés à notre regard. Mais d’un autre côté, ce sommeil bien mérité montre aussi un abandon total mais aussi un manque de vigilance. En dormant, c’est comme si l’on tombait dans l’oubli et que l’on perdait toute notion du temps.

La Résurrection de la fille de Jaïre, Gabriel Von Max, 1878
L’un des grands thèmes abordés lors de l’exposition est aussi celui du sommeil dans la Bible. Ici aussi, le sommeil joue avec son ambiguïté. Il représente dans un premier temps le repos éternel, la confiance en Dieu mais d’un autre coté la mort. Sauf que là, nous avons la notion de résurrection.
L’une de mes oeuvres favorites de cette section est sans doute celle de Gabriel Von Max. Intitulée La Résurrection de la fille de Jaïre et réalisée en 1878, l’artiste revient ici sur un épisode biblique. Jaïre demande à Jésus de venir soigner sa fille âgée de seulement 12 ans. On y voit la jeune fille dans son lit, le teint pale, enroulée dans un linceul blanc. Est-elle endormie ou est-elle morte ? L’ambiguïté est une nouvelle fois bien présente ici mais quelques indices peuvent nous laisser penser à son décès. La pâleur de sa peau, sa tête penchée sur le côté, elle semble complètement abandonnée à un sommeil éternel. Un détail ultime vient confirmer cette théorie, c’est la mouche présente sur son avant bras…
Dans l’histoire, Jésus soigne la fille de Jaïre et celle-ci reprend vie. L’artiste a néanmoins choisi de représenter le moment où elle est encore endormie.

Nuit et Sommeil, Evelyn de Morgan, 1878
Et en réalité, comment parler du sommeil sans parler de la mort ? Dans la Grèce Antique, le sommeil, Hypnos, et la mort, Thanatos, sont frères. Tous deux sont engendrés par la Nuit, Nyx. Il est vrai qu’à première vue, l’état de sommeil et l’état de mort semblent identiques : yeux clos, inconscience, perte de force musculaire… Le XIX° siècle voit d’ailleurs émerger la photographie funéraire. Pour garder un ultime souvenir d’un être cher, les familles mettent leur défunt devant l’objectif et là aussi c’est à s’y méprendre. Est-ce que la personne est réellement décédée ou est-elle simplement en train de dormir ?

Psyché et l’Amour, Simon Vouet, vers 1650
A l’inverse, le sommeil peut aussi évoquer quelques chose de beaucoup plus vivant : l’amour. On peut retrouver énormément d’oeuvres représentants de belles femmes endormies, lascives et abandonnées au regard du spectateur. Ces scènes de sommeil sont en réalité l’excuse parfaite pour les artistes de représenter des corps nus érotisés.
Le lien entre le sommeil et l’amour existe encore une fois depuis toujours. Je pense par exemple au mythe d’Eros (l’amour) et de Psyché (l’âme/l’esprit). Mais on peut aussi penser à Blanche-Neige ou à la Belle au Bois Dormant, toutes deux réveiller d’un sommeil éternel par le baiser véritable de l’amour…

La Somnambule, Maximilian Pirner, 1878
L’exposition revient aussi sur une approche plus scientifique du sommeil. L’analyse des rêves est d’ailleurs l’un des grands thèmes abordés pendant l’exposition. C’est d’ailleurs un sujet qui me fascine moi-même. A une époque, le rêve était considéré comme prophétique mais à partir du XIX° siècle, on en fait une approche beaucoup plus scientifique. Le rêve nous pousse désormais à la réfléxion. Il ne nous dévoile plus notre futur mais notre passé et tente de nous faire comprendre nos désirs profonds et nos peurs les plus enfouies. Evidemment, des grands noms connus comme Freud par exemple s’intéressent à ce sujet. On peut aussi penser à Odilon Redon comme cité plus haut ou encore à Fernand Khnopff. Artistes peintres et écrivains, psychanalystes ou même philosophes se tournent tous vers cette notion méconnues et mystérieuses qu’est le sommeil.
Comme je le dis souvent ici, le XIX° siècle est un moment de l’histoire énormément tourné vers l’invisible et le mystère. Le siècle des Lumières met l’humain au centre de tout. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que le sommeil mais aussi ces troubles tels que les paralysies du sommeil, le somnambulisme et bien sûr le rêve soient devenus les sujets de prédilections de ces têtes pensantes.

Madre, Joaquin Sorolla y Bastida, vers 1900
L’exposition se termine sur la chambre à coucher. Cet endroit aussi a connu une forte évolution au fur et à mesure des époques et des moeurs jusqu’à en devenir un refuge. C’est un espace privé où l’on vient pour se reposer, pour se réfugier aussi dans les bras de nos parents lorsque l’on est enfant et que l’on a peur du noir mais c’est aussi parfois l’endroit où l’on meurt. Le lit est un symbole très fort et encore une fois très ambiguë. Il y accueille nos rêves, nos moments intimes, des moments de vie et nos derniers jours…
Le Musée Marmottan Monet propose une exposition très riche. L’Empire des sens est à découvrir jusqu’au 1er mars. Les thèmes abordés sont vraiment très interessants. Gardez bien à l’esprit lors de votre visite cette notion d’ambiguïté. Vous la retrouverez de toute façon tout au long du parcours. N’hésitez pas à revenir ici pour m’en dire des nouvelles.
Que pensez-vous de ce thème abordé par le Musée Marmottan Monet ?
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