Découvrez l’exposition « Figures du Fou » au Musée du Louvre

Jusqu’au 3 février 2025, le Musée du Louvre propose une exposition de grande envergure. Intitulée « Figures du Fou, du Moyen Age aux Romantiques« , le parcours revient sur les différentes facettes de ce personnage haut en couleur. Ayant pris naissance aux Moyen Age, notamment dans la pensée religieuse omniprésente de cette époque, le fou est un personnage bien présent dans la culture. Il se présente dans différents aspects de la vie et inspirera de nombreux artistes. Plus de 300 oeuvres sont alors à découvrir à travers un parcours chronologique. Du fou médiéval jusqu’au thème de la folie du XIX° siècle, comment évoluera la représentation du fou à travers l’histoire ?

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Fou jouant de la cornemuse, Artiste anonyme, vers 1510-1520

Le parcours nous emmène donc en plein Moyen Age, au XIII° siècle. A cette époque, l’image du fou est quasiment omniprésente. On le retrouve notamment dans des manuscrits. Celui-ci y est représenté très souvent de manière très grotesque, en contraste total avec le sérieux des écrits sans doute pour divertir un tout petit peu les lecteurs. Le fou sort peu à peu de ces livres pour recouvrir tout l’espace. On le retrouve alors du sol au plafond, dans des cathédrales, sur les murs, sur des tapisseries ou encore sur des vitraux.

Une vierge folle, réalisée en 1923 d’après une oeuvre originale du XIII° siècle, Atelier de l’Oeuvre de Notre-Dame

Mais que représente le fou ? Qui est-il et quelle est sa fonction ?

Dans un monde où la religion est omniprésente, le fou est celui qui se détourne de Dieu, qui le refuse. Plusieurs passages de la Bible condamnent d’ailleurs la folie. Mais dans une autre lecture, la folie peut aussi être vue comme une adoration de Dieu, un véritable modèle de sainteté. Cette opposition me fait d’ailleurs penser au concept de la vierge folle et de la vierge sage. Le vierge sage évidemment est celle qui croit en Dieu, qui l’accepte. Quant à la vierge folle, elle est le symbole ultime de la paresse et de l’oisiveté qui amènent fatalement à l’oubli de Dieu.

Il est aussi question à cette époque des « fous de Dieu » comme c’est le cas par exemple pour Saint François. Celui-ci quittera sa riche vie de bourgeois pour vivre comme un mendiant. Il abandonne alors sa famille, parle aux oiseaux et dit recevoir les stigmates du Christ sur son corps…

Comme on le voit ici avec ces différents exemples, il existe dans la société médiévale un certain paradoxe. Dans un premier temps, on rejète la folie, la religion tente de prévenir et de mettre en garde. Mais dans un second temps, on voit que la folie permet de se rapprocher de Dieu, de toucher du doigt le divin. Il est alors question ici de folie positive.

Aquamanile : Aristote et Phyllis, Artiste anonyme, vers 1380

Comment parler de folie sans parler d’amour ?

Au Moyen Age, en Europe, les romans de chevalerie font grandement échos à la folie de l’amour. Le fou symbolise ici la luxure mais aussi la débauche. Il se fait alors très moralisateur. Il peut parfois être représenter de manière très obscènes afin de faire référence à ce que l’amour entre deux personnes peut engendrer. On remarque aussi ici une inversion des valeurs car dans l’amour courtois, dans les romans de chevalerie, ce sont les femmes qui détiennent le pouvoir sur les hommes. On le voit par exemple avec cette aquamanile représentant Aristote et Phyllis. Celle dernière l’utilise comme siège. Elle lui tire les cheveux et lui met une tape sur les fesses. Aristote est tourné en ridicule.

On peut aussi prendre pour exemple l’histoire de Lancelot qui perd complètement la raison par amour Guenièvre. Cette dernière devient une véritable obsession. Le chevalier en perd tous ses moyens, fait les mauvais choix, et en vient même à oublier qui il est. Encore une fois, l’image du fou est utilisée dans les romans de chevalerie comme une mise en garde. Il est alors fortement suggéré que le sentiment amoureux peut être destructeur.

Copie de la Danse macabre de Bâle de 1439, Johann Rudolf Feyerabend, 1806

La figure du fou se lie aussi peu à peu à l’art macabre et prend alors un aspect profane. En plus de dénoncer la vanité de l’amour, il vient aussi mettre en lumière l’éphémérité de la vie. Le fou prend la forme d’un squelette dansant. Les danses macabres prennent très souvent la forme de grandes fresques. On y voit ces squelettes danser avec des vivants : des rois et reines, des personnes appartenant au clergé, des nobles, des bourgeois et enfin des paysans. Les danses macabres montrent bien que fasse à la mort, nous sommes tous égaux.

Cette copie de la Danse Macabre de Bâle est très intéressante puisque la mort ici portera elle-même à un moment les apparats du fou et entrainera ce dernier dans sa danse…

Jeanne de Castille dite Jeanne la Folle, Juan de Flandres, vers 1496

Jusqu’à présent, nous avons vu que la figure du fou se retrouve dans tous les pans de la vie des hommes au Moyen Age. Que ce soit dans la religion, dans les décorations ou dans la culture, le fou est présent toujours prêt à délivrer son message. Celui-ci fait même son entrée à la cour du roi dans le but encore une fois de divertir.

C’est au XIV° siècle que le fou et sa parole ironique mais aussi critique s’institutionnalise. On voit donc une nouvelle fois un sacré paradoxe puisque l’on met en opposition un roi soit disant choisi par Dieu face à ce que l’on appelait à l’époque un « bouffon« . Ces derniers étaient bien souvent des « simples d’esprit » ou à l’inverse des « pleins d’esprit ». Cette dernière catégorie fait référence à des personnes très intelligentes qui savaient parfaitement manier l’art de la bouffonnerie.

Ironie du sort, au fur et à mesure de l’histoire, il a pu arriver que le fou de la cour ne soit pas celui que l’on croit. Il est parfois arrivé que le vrai fou soit le roi ou la reine. Je pense par exemple à l’histoire de Charles VI (1368-1422) en France ou encore à Jeanne de Castille (1479-1555) en Espagne qui fut d’ailleurs surnommée Jeanne la Folle. L’ordre se retrouve encore une fois ici renversé…

Portrait de fou regardant à travers ses doigts, Maitre de 1537

Comme nous avons pu le voir, le fou fait donc partie intégrante de la société. On commence même à le retrouver en ville lors de diverses fêtes et jeux. Il y est omniprésent. Pendant ces fêtes, tous les rôles sont inversés. Les gens se déguisent, c’est le carnaval qui prend vie. On joue de la musique, on danse, on chante… Le fou est celui qui mène la danse. On le reconnait grâce à sa silhouette, à sa tenue bariolée, à ses grelots et à sa marotte qu’il brandit comme un sceptre. Il est le roi de la fête.

Le carnaval fait alors écho à une forme de folie collective.

Le concert dans l’oeuf, Jérôme Bosch, vers 1505-1515

Le Moyen Age se termine enfin et laisse alors place à la Renaissance. Cette période tente alors d’analyse la figure de fou et de comprendre comment il s’est créé mais ici, quelque chose change. Le fou est en réalité un simple spectateur. Il est le témoin de la folie humaine et de son dysfonctionnement. Il y a ici une vision très pessimiste du monde et plutôt fataliste. Les péchés humains sont grandement pointés du doigt.

L’Exorcisme du roi Charles VI, François-Auguste Biard, 1839

Arrivés au XVIII° et XIX° siècle, les artistes reprennent les différentes figures du fou du Moyen Age pour les réadapter à leur époque. Une dimension beaucoup plus profonde nait alors. On met en avant ses sentiments dans des scènes bien souvent tragiques voire cruels. Cela s’explique par la venue du courant romantique qui se caractérise par une omniprésence des émotions comme la tristesse ou la mélancolie mais aussi par une opposition entre la raison et la morale. Le fou a totalement sa place dans cet univers et s’y adapte parfaitement.

Les artistes s’inspirent donc de la littérature, de tous ces héros tragiques au destin bien souvent fatal. Ils s’inspirent aussi de leur propre malheur et de leur fragilité psychique. En plus de faire peur, la folie commence à fasciner. Le XIX° siècle est clairement une époque où l’on s’intéresse de plus en plus aux tourments de l’âme. On voit émerger les prémisses de la psychanalyse. Sigmund Freud en est d’ailleurs un précurseur. Il nait en 1856, en plein dans l’époque romantique.

Le Docteur Pinel, médecin en chef à la Salpêtrière en 1795, Tony Robert-Fleury, 1876

A partir d’ici, le fou n’amuse plus. Il n’est plus celui qui fait rire la galerie, qui pique ou qui critique. Le fou devient un malade et on commence à se demander s’il ne faudrait pas l’enfermer pour tenter de le soigner. On commence alors à parler d’aliénation mentale. On crée des espaces pour eux comme par exemple la Salpétrière ou à Bicêtres à Paris qui deviennent des asiles. Les médecins tentent de comprendre le pourquoi de leur âme si tourmentée.

Lady Macbeth somnambule, Johann Heinrich Füssli, 1780

L’exposition Figures du Fou, du Moyen Age aux Romantiques du Musée du Louvre est extrêmement riche comme vous avez pu le voir. Énormément de sujets y sont abordés. De manière chronologique, nous avançons dans le temps afin de voir l’évolution du fou à travers l’histoire. Prenant ses bases dans un Moyen Age ultra religieux, le fou se voit entrer dans toutes les sphères de la société. Dans les livres, à la cour du roi, jusqu’aux fêtes de village, son image ne peut nous échapper. Derrière sa folie se cache en réalité très souvent une leçon à retenir, une morale. Il met en lumière les nombreux paradoxes d’une société en renversant l’ordre des choses. Il pousse alors à la réflexion.

Des siècles plus tard, le fou médiéval se métamorphose et laisse ses grelots et sa marotte de côté. Le fou en réalité, c’est vous et moi. On ne peut plus le reconnaitre en un seul coup d’oeil. Il s’est délesté de ses nombreux apparats pour se fondre dans la société. Le fou devient alors un héros tragique, une fracture mentale, quelqu’un de malade. La folie prend définitivement le pas sur la raison…

Que pensez-vous de ce thème très riche que le Musée du Louvre nous propose ?

Vous avez jusqu’au 3 février pour découvrir cette incroyable exposition.

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